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Mine canadienne accusée du pire désastre minier de l’histoire de l’Argentine

#16 of 37 articles from the Special Report: National Observer Français
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Une manifestation contre Barrick Gold à Jachal le 23 avril, 2016. Photo de Jachal no se Toca.

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Dans la petite ville de Jachal acrochée à la cordillère des Andes, en Argentine, la visite officielle du premier ministre Trudeau à Buenos Aires est loin d'être vue d'un bon oeil.

Ici, le visage du Canada c’est Barrick Gold. Or, l’entreprise est tenue responsable du «pire désastre minier de l’histoire du pays», dénonce Me Enrique Viale, président de l’Association argentine des avocats en environnement.

«Des compagnies comme Barrick Gold, on n’en veut pas chez nous», gronde Gustavo Herrmann. Ce dernier est un des leaders d’un groupe de citoyens qui réclament la fermeture de Veladero, une des plus grande mine d’or au monde qu’exploite le géant canadien depuis 2005 dans la Cordillère des Andes

Depuis septembre 2015, la ville toute entière est placardée d'affiches

Le regroupement Jachal no se toca (On ne touche pas à Jachal) accuse l’entreprise de contaminer les rivières et les nappes d’eau souterraines en laissant s’échapper du cyanure, de l’arsenic et des métaux lourds dans l’environnement. Ils reprochent à Barrick Gold un déversement massif d’eau cyanurée qui a contaminé cinq rivières de la région en septembre 2015. Moins d’un an an plus tard, le 8 septembre dernier, l’entreprise a admis un second «incident environnemental».

Selon Barrick Gold, l’incident a été contenu sur le site de la mine. «Il n’y a pas eu de déversement de solution cyanurée. L’incident a consisté en la rupture d’une canalisation qui a provoqué la sortie de minéraux solides du bassin de lixiviation», explique Matias Maciel, le porte-parole de la compagnie à Buenos Aires. Depuis Toronto, son collègue Andy Lloyd, est d’avis que les revendications des citoyens du regroupement Jachal no se toca «ne sont pas crédibles».

Mais, les citoyens de Jachal n’en démordent pas. Depuis septembre 2015, la ville toute entière est placardée d’affiches. «L’eau vaut plus que l’or», «Combien de lingots d’or vaut notre santé?», peut-on lire un peu partout. Des citoyens se relaient dans un campement permanent installé au centre-ville et plusieurs ont occupé l’Hôtel de Ville pendant plus de 30 heures le mois dernier.

Veladero, une des plus grande mine d’or au monde. Photo de Barrick Gold.

Analyses contradictoires

Appuyé par des avocats et des chercheurs de tout le pays, le regroupement multiplie les analyses indépendantes qui contredisent la version de Barrick Gold. Des études menées à leur demande par l’Université Technologique Nationale (Universidad Tecnológica Nacional) et l’Université national de Cuyo (UNCuyo) ont démontré que de fortes doses de cyanures, de mercure et de métaux lourds étaient présentent dans les cours d’eau.

Les 25 et 26 août dernier, l’UNCuyo a relevé 13 échantillons dans différents secteurs de Jachal. Les résultats de laboratoire obtenus par National Observer démontrent une contamination telle que la plupart des point d’eau étudiés sont impropres à la consommation humaine, à l’irrigation et à la vie aquatique.

L’entreprise canadienne rejette les conclusions des universitaires. «Toutes les analyses indépendantes ont montré que l’incident de septembre 2015 ne posait aucun risque pour les populations ou l’environnement», insiste M.Lloyd. Idem pour le second incident, du 8 septembre 2016, complète son collègue M. Maciel.

Mais pour Me Viale, «les analyses de Barrick ne sont pas fiables». «C’est comme demander au loup de nous dire comment va le poulailler», offre-t-il en comparaison. «On assiste à une contamination lente, silencieuse, invisible, implacable pour de très nombreuses années», déplore l’avocat. «Le problème est grave. Si ça n’arrête pas maintenant, nous devons être prêts à mourir ou à quitter la région», complète Gustavo Herrmann.

Sanctions

Face à la grogne populaire et à l’attention croissante des médias nationaux sur Veladero, la province de San Juan a ordonné la fermeture temporaire de la mine en septembre et a forcé la compagnie à se soumettre à une série d’inspections. «Barrick s’est mise à la disposition des autorités et de la justice dès le premier instant et a collaboré en fournissant toute l’information requise», assure M. Maciel.

L’entreprise est accusée d’avoir violé la loi sur les résidus dangereux et neuf de ses cadres doivent faire face à la justice. Le géant canadien s’est aussi vu imposer une amende de plus de 145 millions de pesos (environ 12,7 millions $ CA). Peu après avoir donné le feu vert à la reprise des activités de Veladero, en début octobre, le gouverneur de San Juan, Sergio Uñac, a prévenu que la minière n’avait plus droit à l’erreur: «à partir de maintenant, son comportement doit être impecable».

Mais pour Me Viale les mesures du gouvernement provincial sont un écran de fumé. Pour lui, les sanctions et l’amende imposées à la compagnie sont complètement dérisoires. «Barrick a sorti cet argent des montagnes de San Juan en six jours à peine. Cette amende a été imposée pour calmer le jeu, pour sauver les apparences», dénonce-t-il.

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